Manatee

Les zones humides au cœur de la biodiversité régionale : gros plan sur le Critère 3

01 octobre 2024
Manatee

Voici le troisième article de notre série mensuelle consacrée aux neuf critères d’inscription des zones humides d’importance internationale (« les Sites Ramsar »).

 

De la Zone humide du Sudd, au Soudan du Sud, au Marais d’Okefenokee, en Oklahoma, les écosystèmes des milieux humides jouent un rôle crucial pour la protection de la biodiversité régionale. 

La Convention de Ramsar sur les zones humides met ce rôle en évidence dans le Critère 3 selon lequel on peut considérer qu’une zone humide est d’importance internationale si elle abrite des populations animales et végétales soutenant la biodiversité d’une région biogéographique. Ce critère — qui s’applique au nombre étourdissant de 1739 des 2520 zones humides d’importance internationale — vise précisément à identifier, dans ces régions, des zones humides où vivent des espèces importantes, endémiques ou rares.

Application du Critère 3 aux zones humides

Plusieurs facteurs aident à déterminer si une zone humide remplit le Critère 3. L’un d’entre eux consiste à savoir si le site est un point chaud de la biodiversité, même si l’on ne connaît pas encore toute la gamme des espèces présentes. Les Zones humides des Lacs Nguru, au Nigéria, par exemple, abritent une diversité d’espèces adaptées aux crues saisonnières, notamment le lamantin d’Afrique de l’Ouest et le bec-en-ciseaux d’Afrique En danger, et sont importantes pour la biodiversité du Nigéria mais aussi pour celle de toute la région du Sahel.

On peut aussi prendre en compte les zones humides qui sont des centres d’endémisme, c’est-à-dire qui abritent des espèces que l’on ne trouve nulle part ailleurs. Le Marais poitevin, deuxième plus grande zone humide de France, abrite deux sous-espèces endémiques du littoral Atlantique : un oiseau, la gorgebleue à miroir blanc de Nantes et l’œnanthe de Foucaud, une espèce de plante protégée qui pousse dans les secteurs saumâtres de l’estuaire de la Sèvre niortaise.

Une zone humide peut parfois satisfaire à ce critère si elle contient une vaste gamme d’habitats typiques de la région. Ainsi, le Parc national de Wasur, en Indonésie, présente un mélange de zones humides, de savanes et de forêts caractéristiques de la région biogéographique de Nouvelle-Guinée. Ces habitats accueillent de nombreuses espèces importantes telles que le crocodile de Nouvelle-Guinée et le thylogale ou pademelon à queue courte. 

Dans les régions où il y a des milieux uniques, tels que des zones semi-arides, les zones humides accueillant des espèces adaptées à ces habitats hostiles sont particulièrement importantes. Le Parc national de Viruá, au Brésil, est un exemple où les zones humides abritent une riche diversité d’espèces, en particulier celles qui sont adaptées aux écosystèmes de sable blanc de la région – et contribuent à la biodiversité de l’Amazonie.

 

Marais

Le contexte régional

Lorsqu’on applique le Critère 3, il importe d’examiner le rôle d’une zone humide dans le contexte régional. Cela suppose de comprendre comment la zone humide est une source d’espèces pour les espaces voisins et son importance pour le maintien de la biodiversité globale de la région. Un inventaire détaillé des espèces animales et végétales du site, et une bonne connaissance de la biodiversité régionale, sont nécessaires pour cette évaluation.

Les administrateurs de sites et les pays peuvent utiliser des ressources telles que « Centres of Plant Diversity: a guide and strategy for their conservation » (WWF & UICN 1994-1997) et la base de données mondiale des Zones d’oiseaux endémiques de BirdLife International pour rassembler les données nécessaires. Parmi les autres ressources, on peut citer la base de données sur les espèces de Biodiversity Hotspots et Global Amphibian Assessment.

L’importance de la protection

Les zones humides qui remplissent le Critère 3 sont importantes, non seulement pour les espèces que l’on y trouve mais aussi pour les écosystèmes dont elles font partie. Protéger ces sites aide à maintenir la biodiversité et l’équilibre écologique des régions concernées, ce qui à son tour est bénéfique aux communautés humaines. Cela ouvre également des possibilités de recherche, en offrant une perspective sur le fonctionnement de ces écosystèmes et les meilleurs moyens de les protéger.

Les menaces ne cessant d’obscurcir l’horizon des zones humides, la principale priorité devrait être de les identifier et de les inscrire sur la Liste des Sites Ramsar. En privilégiant la conservation, la restauration et l’utilisation rationnelle des zones humides satisfaisant au Critère 3, les Parties contractantes à la Convention peuvent œuvrer à la survie de la biodiversité des régions biogéographiques de la planète.