Zéro déchet et péril plastique : la riposte des zones humides contre cette pollution qui menace leur existence
La prolifération des débris plastiques pose un défi croissant pour les zones humides du monde entier.
Jouant un rôle vital dans notre écosystème, les zones humides filtrent l’eau, fournissent des habitats à diverses espèces et atténuent les effets du changement climatique. Mais ces écosystèmes inestimables sont de plus en plus menacés par la pollution plastique.
La production mondiale de plastique a explosé depuis le milieu du 20e siècle, passant de deux millions de tonnes en 1950 à 460 millions de tonnes en 2019. Le recours accru au plastique s'est traduit par une augmentation des déchets plastiques, dont les conséquences sur les zones humides et leurs habitants sont dévastatrices.
Malgré cela, plusieurs Zones humides d'importance internationale (« Sites Ramsar ») sur lesquels les communautés locales comptent pour assurer leurs moyens de subsistance se défendent. Dans le cadre d’efforts concertés, les secteurs public et privé travaillent à l’application de stratégies innovantes pour l’élimination des déchets dans ces Sites.
Comprendre la pollution plastique dans les zones humides
La pollution plastique dans les zones humides découle notamment des méthodes inappropriées d’élimination des déchets et des ruissellements industriels. Qu’il s’agisse de pailles, d’emballages ou de sacs, le plastique jeté se fraye un chemin dans les zones humides comme les cours d’eau, les rivières, etc., pour se déverser à terme dans les océans.
Les conséquences sont dramatiques pour ces berceaux de la diversité biologique dont un nombre incalculable d’espèces de plantes et d’animaux dépendent pour survivre. Les déchets plastiques réduisent la biodiversité de la flore et de la faune, menaçant les espèces sauvages à cause des risques d’enchevêtrement et d’ingestion. En outre, ils entachent la beauté des zones humides qui constituent souvent des aires de loisirs naturelles pour les habitants locaux et sont vectrices d’écotourisme.
La pollution plastique reste un défi en raison de sa présence envahissante, mais aussi de la difficulté à modifier les comportements des parties prenantes et de la dynamique complexe des écosystèmes de zones humides.
Il est indispensable de régler la crise de la pollution plastique dans les écosystèmes les plus productifs et vulnérables, non pas uniquement pour le bien des écosystèmes et de la vie sauvage qui s’y trouve, mais aussi pour la santé des populations et leur bien-être socioéconomique. Plusieurs études ont en effet révélé la présence de microplastiques dans le sang, les organes et les placentas humains, sans compter que leurs impacts sur les systèmes endocrinien et immunitaire restent à ce jour inconnu.
La prévention et le nettoyage des zones humides et des océans ne suffisent pas. Il faut adopter une approche exhaustive assortie de solutions intégrées sur tout le cycle de vie du plastique.
Thane Creek est un sanctuaire pour les flamants roses et d’autres espèces d’oiseaux importantes.
Succès des Sites Ramsar en matière de nettoyage et de conservation des zones humides
Créée en 1971, la Convention sur les zones humides est un traité intergouvernemental pour la conservation et l’utilisation rationnelle des zones humides. Inscrites au titre de la Convention, les Zones humides d'importance internationale sont soumises à des exigences et des lignes directrices strictes en ce qui concerne leur gestion.
Beaucoup de Sites Ramsar ont enregistré des progrès considérables en matière de nettoyage de la pollution plastique.
Le Site Ramsar de Thane Creek, en Inde, fait l’objet d’un projet collaboratif dirigé par le Programme des Nations Unies pour l’environnement et l’Institut de l'énergie et des ressources. Parmi les efforts déployés pour sensibiliser les habitants locaux figure la campagne multidimensionnelle « Rethink Plastic » axée sur le nettoyage et les changements de comportement.
Il faut organiser des campagnes régulières pour retirer les débris qui nuisent aux mangroves du site et les traiter de façon responsable. Au cours de l’une des principales campagnes de 2020 ayant réuni 100 volontaires, plus de 100 kg de déchets plastiques ont été ramassés dès la première heure de nettoyage, ce qui donne un aperçu de l’immense quantité de plastique accumulée sur ce site.
Grâce à la collaboration des gouvernements, des organisations intergouvernementales, des communautés locales, des ONG et du secteur privé, le nettoyage de Thane Creek connaît un franc succès. Il constitue un exemple facile à reproduire pour les autres Zones humides d'importance internationale.
Un autre exemple est le site de Prek Toal qui comprend les plaines inondables du lac Tonlé Sap au Cambodge. En plus d’être essentielles au maintien de la richesse biologique du site, les eaux du lac accueillent les populations locales qui vivent dans des villages flottants et gagnent leur vie en pratiquant la pêche et l’aquaculture.
Conformément à sa « Stratégie circulaire 2023-2028 sur l’environnement », le ministère de l’Environnement du Cambodge prend des mesures proactives pour veiller à la propreté des étendues d’eau du pays et empêcher toute perte de biodiversité causée par le changement climatique.
Les autorités locales ont mené des études approfondies et élaboré un plan d’action à plusieurs phases pour mettre en œuvre des mesures visant à éradiquer la pollution plastique sur la surface du lac Tonlé Sap. Dans un premier temps, l'objectif est de sensibiliser le public en l’aidant à mieux comprendre les enjeux liés aux déchets plastiques et à leur nettoyage. Après avoir sensibilisé la moitié de la population, il s’agira dans un second temps d’inciter le public à participer aux opérations de nettoyage et d’enlèvement des débris de plastique du lac Tonlé Sap.
Le lac Tonlé Sap n’abrite pas seulement des villages flottants, mais offre également un abri à une faune abondante.
Efforts concertés contre la pollution plastique
Il est capital que la communauté internationale s’allie et s’engage à préserver les zones humides pour les générations futures. Toutes les parties prenantes ont un rôle à jouer dans la réduction de la pollution plastique. Les consommateurs et les entreprises peuvent s’efforcer de modifier certaines habitudes de consommation bien ancrées et s’engager à traiter correctement les déchets plastiques. À un niveau plus élevé, les gouvernements, les communautés et les secteurs peuvent améliorer et financer les processus décisionnels sur la pollution plastique.
Lors de l’Assemblée des Nations Unies pour l’environnement en 2022, une résolution historique, visant à lancer un comité intergouvernemental pour mettre au point un accord international juridiquement contraignant sur la pollution plastique, a été adoptée. À cet égard, un Comité intergouvernemental de négociation sur la pollution plastique a été établi pour élaborer d’ici fin 2024 une approche exhaustive portant sur l’ensemble du cycle de vie du plastique, y compris sa production, sa conception et son élimination.
Le traité à paraître constitue un moment charnière dans la lutte contre la crise environnementale causée par la pollution plastique. De tels cadres législatifs internationaux peuvent favoriser le renforcement des capacités et les transferts de technologies, suscitant des innovations et des investissements dans des solutions d’économie circulaire.
Les initiatives comme celle de la Journée internationale du zéro déchet revêtent également une grande importance, car elles incitent chacun d’entre nous à modifier ses comportements et donnent l’élan nécessaire pour faire de la réduction et de l’élimination de la pollution plastique une priorité du public.
En définitive, toute défaite pour le plastique est une victoire pour les zones humides... et pour l’humanité.